Les grands sites industriels, ennemis de l'emploi ?


Dans la base mondiale Trendeo, nous avons sélectionné 6009 investissements où le montant investi et les emplois créés étaient connus (pour un total de 2073 milliards de US$). Puis, nous avons déterminé les intervalles qui permettaient de séparer en déciles les investissements (chaque classe de projets représente 10% du total des montants investis).

Nous avons ensuite calculé le nombre d'emplois créés par M$ investi. Comme le montre le graphique ci-dessous, le résultat est assez incontestable : le M$ investi dans les plus grands projets crée 1,3 emplois, contre 24 emplois pour les plus petits projets.

Sans recalculer les classes d'investissement, nous avons recherché les ratios correspondants pour la France : on passe de 4,4 emplois pour les petites projets à 0,5 emplois pour les plus grands. Le nombre d'emplois n'est pas le même, le tissu économique français est plus développé que la moyenne mondiale (nos données mondiales intègrent des projets au Bangladesh ou l'on crée facilement, dans le textile notamment, plusieurs centaines d'emplois pour un investissement assez faible).

Faut-il pour autant proscrire les grands investissements, pauvres en emplois ?

◼ Il faut d'abord prendre en compte les effets d'entraînement d'un grand investissement. Ils sont certainement plus importants que investissements diffus, qui n'ont pas d'impact direct sur le tissu local, alors qu'un grand projet attirera souvent des sous-traitants locaux. Les trois projets d'investissements dans les semi-conducteurs à Dresde (Infineon Technologies, TSMC et GlobalFoundries), annoncés dans les trois dernières années, pour un total de 25 milliards de dollars, sont l'équivalent du plan de relance du gouvernement Sarkozy de décembre 2008 (sans même compter les emplois induits).

◼ Puis ne pas oublier que l'investissement se traduit normalement par de la production (encore que, Noah Smith remarquait à propos des grands projets américains annoncés récemment, qu'ils ont du mal à sortir de terre, parfois en raison de contraintes administratives). Cette production est proportionnelle à l'investissement et on peut estimer que ce ratio production/investissement change peu selon la taille du projet. On aura donc un classement de la productivité par emploi exactement inverse de celui de l'emploi par million investi. Un million dans un grand projet sera 10 à 20 fois plus productif. Plus de productivité c'est aussi, plus ou moins directement, de meilleurs salaires et un moyen de limiter les difficultés de recrutement.

◼ Il est donc nécessaire d'avoir de petits et moyens investissements pour entretenir un tissu économique diversifié, mais, à un moment où l'on s'interroge sur notre productivité perdue, s’intéresser aux grands et très grands projets est également important.

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